Mesures sociales : ce qui n’a finalement pas pris fin au 31 décembre 2023 ou pas vraiment pris effet au 1er janvier 2024 !

Publié le 08/01/2024 à 15:31, modifié le 16/01/2024 à 16:41 dans Rémunération.

Temps de lecture : 8 min

Plusieurs mesures sociales devaient prendre fin au 31 décembre 2023. Mais ce ne sera finalement pas le cas car elles ont été prolongées en 2024. A l’inverse, pour certaines mesures entrées en vigueur au 1er janvier 2024, il manque en pratique des textes pour permettre leur mise en œuvre effective…

Les mesures qui n’ont pas pris fin au 1er janvier 2024…

Le CSP

La convention entre l’Etat et les partenaires sociaux relative au contrat de sécurisation professionnelle (CSP) arrivait à échéance le 31 décembre 2023. Dans un contexte de négociation des règles d'assurance chômage actuellement en cours, la durée de la convention a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2024.

Prolongation des règles d’assurance chômage

La nouvelle convention d’assurance chômage n’ayant pas encore été agréée, un décret a été pris pour prolonger les règles actuelles, qui devaient s’achever au 31 décembre 2023, jusqu’au 30 juin 2024.

Titres restaurant et courses alimentaires

En 2024 il est toujours possible d’utiliser les titres restaurant pour acquitter en tout ou en partie le prix de tout produit alimentaire, qu’il soit ou non directement consommable. De nombreux produits sont ainsi concernés comme la viande, les pâtes, le riz, les œufs ou encore la farine.

Ces produits doivent toutefois être achetés auprès d’une personne ou d’un organisme exerçant la profession de restaurateur, d'hôtelier restaurateur ou une activité assimilée, ou la profession de détaillant en fruits et légumes.

Aide exceptionnelle à l’alternance

C’était annoncé et ça a bien eu lieu : un décret prolonge l’aide à l’alternance qui s’applique désormais pour les contrats d'apprentissage et les contrats de professionnalisation conclus du 1er janvier au 31 décembre 2024.

Seul changement à signaler : les contrats de professionnalisation expérimentaux ne sont plus concernés.

Emplois francs

Le dispositif d’aide financière « emplois francs » devait s’achever au 31 décembre 2023.

Sa prolongation est toutefois intervenue pour une année supplémentaire.

Contrat de professionnalisation expérimental

La loi avenir professionnel a mis en place une expérimentation, permettant la conclusion d’un contrat de professionnalisation pour acquérir des compétences définies par l’employeur et l’opérateur de compétences, en accord avec le salarié.

Cette possibilité a démarré le 28 décembre 2018, sur tout le territoire national et pour une durée de 3 ans maximum.

La loi relative à l’inclusion dans l’emploi a prolongé l’expérimentation de 2 ans. Elle devait donc arriver à son terme fin 2023. Toutefois, le ministre du Travail Olivier Dussopt a annoncé qu’il reconduisait le contrat de professionnalisation expérimental pour une durée d'1 an, soulignant qu’il s’agissait d’un levier efficace de recrutement en contrat durable. Aucun texte n’a toutefois encore été publié en ce sens sachant qu’il faudrait normalement une loi.

…et celles qui n’ont pas complètement pris effet

CPF et permis de conduire

Une loi du 21 juin 2023 a étendu les possibilités d’utilisation du CPF à toutes les catégories de permis de conduire d’un véhicule terrestre à moteur à compter du 1er janvier 2024.

Toutefois les conditions et les modalités d'éligibilité au CPF des nouvelles catégories de permis de conduire visées doivent encore être précisées par décret.

Le site moncompteformation.gouv.fr indique que pour des raisons techniques de mise en œuvre, et sous réserve de la publication du décret, l’inscription à ce type de formation sera disponible à compter du 12 janvier sur le site.

Signalement d’un refus de CDI

C’est l’une des grosses nouveautés de ce début d’année : un décret a été publié concernant le refus d’un CDI à l’issue d’un CDD ou d’une période d’intérim. Ce texte prévoit que le salarié qui refuse ainsi un CDI peut, sous certaines conditions bien précises, perdre son droit au chômage. De son côté l’employeur doit informer France Travail du refus du salarié.

En théorie, tout cela s’applique au 1er janvier 2024. Seulement voilà il manque encore un arrêté qui doit venir fixer les modalités du partage d’information entre l’employeur et France Travail. Le ministère du Travail lui-même conseille aux employeurs de retarder leur mise en relation avec France Travail jusqu’à sa publication.

Actualisation du 10 janvier : le texte est paru (voir notre article Refus d'une proposition de CDI : les modalités des nouvelles procédures détaillées).

PPV

Le régime social de la PPV change au 1er janvier 2024. Si votre entreprise est d’au moins 50 salariés, elle perd le régime social de faveur en 2024 (CSG, forfait social, etc.) et les salariés l’exonération fiscale.

La loi sur le partage de la valeur prévoit néanmoins une mesure favorable pour les salariés : si on affecte sa PPV sur son plan d’épargne salariale ou son plan d’épargne retraite d'entreprise, la somme pourra bien être exonérée d’impôt sur le revenu dans des conditions qui seront définies par décret. Le BOSS précise que cela vaudra dans le respect des conditions de durée de blocage sur les plans mais que cette mesure n’est toutefois pour l’instant pas applicable dans l’attente de la publication de ce décret. Le décret précisera notamment les modalités d’information du salarié et le délai qui lui est laissé pour décider de placer ou non la PPV sur un de ces plans.

Fausses couches

La loi visant à favoriser l'accompagnement des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse accorde l’indemnité journalière de Sécurité sociale sans délai de carence (normalement de 3 jours) pour les arrêts de travail qui font suite à une interruption spontanée de grossesse.

Cela vaut pour les interruptions spontanées de grossesse ayant eu lieu avant la 22e semaine d’aménorrhée.

Une nouveauté qui devait s’appliquer à compter d'une date prévue par décret, et au plus tard du 1er janvier 2024. Mais pour l’instant aucun décret n’a été publié.

Dans un communiqué du 2 janvier 2024, l’Assurance maladie a confirmé que cela s’appliquait malgré tout au 1er janvier 2024. Elle précise également la marche à suivre. Le médecin peut ainsi prescrire un arrêt de travail sous la forme d’un formulaire papier spécifique. Le patient devra transmettre ce formulaire papier CERFA à sa caisse d’assurance maladie, comme pour tout arrêt de travail pour maladie.

Il est aussi souligné qu’une salariée qui souhaite éviter que son employeur puisse avoir indirectement connaissance du motif médical de son arrêt peut demander à son praticien de lui prescrire un arrêt de travail pour maladie dans les conditions de droit commun. Mais elle sera alors indemnisée avec application du délai de carence.

Abus de droit et contrĂ´le URSSAF

La LFSS 2024 a simplifié la procédure d’abus de droit jugé trop lourde. Elle supprime ainsi le comité des abus de droit auquel le litige pouvait être soumis en cas de désaccord.

Cela doit s'appliquer aux observations notifiées par l'URSSAF à compter du 1er janvier 2024 mais un décret est toujours manquant.

Santé-sécurité

Deux textes manquants sont à signaler concernant la santé-sécurité :

  • le dĂ©cret relatif Ă  la mise en place d’un volet dĂ©diĂ© au dossier mĂ©dical de santĂ© dans le dossier mĂ©dical partagĂ©, mesure prĂ©vue par la loi santĂ© au plus tard au 1er janvier 2024 ;
  • un arrĂŞtĂ© relatif au suivi des salariĂ©s exposĂ©s aux rayonnements ionisants, qui empĂŞche la rĂ©forme prĂ©vue au 1er janvier 2024 par un dĂ©cret de juin 2023.

Retrouvez plus de détails sur ces sujets et bien d’autres avec notre synthèse :

Arrêté du 28 décembre 2023 portant agrément de l'avenant n° 8 du 15 novembre 2023 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle
Décret n° 2023-1230 du 21 décembre 2023 prorogeant temporairement les règles du régime d'assurance chômage, Jo du 22
Loi n° 2023-1252 du 26 décembre 2023 visant à prolonger en 2024 l'utilisation des titres restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables, Jo du 27
Décret n° 2023-1354 du 29 décembre 2023 portant prolongation de l'aide aux employeurs d'apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation, Jo du 30
Décret n° 2023-1353 du 29 décembre 2023 modifiant le décret n° 2019-1471 du 26 décembre 2019 portant généralisation des emplois francs et création d'une expérimentation à La Réunion, Jo du 30
Loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire, Jo du 22
Décret n° 2023-1307 du 28 décembre 2023 relatif au refus par un salarié d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, Jo du 29
Loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise, art.9, Jo du 30
Mise à jour du BOSS du 22 décembre 2023
Loi n° 2023-567 du 7 juillet 2023 visant à favoriser l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche, Jo du 8
Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la Sécurité sociale pour 2024, Jo du 27, art. 5

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Anne-Lise Castell

Juriste en droit social