Réalisation d’heures supplémentaires : la Cour de cassation consolide le partage de la preuve

Publié le 21/11/2023 à 07:39 dans Temps de travail BTP.

Temps de lecture : 3 min

En cas de litige sur la réalisation d’heures supplémentaires, la Cour de cassation considère depuis toujours que la charge de la preuve ne repose pas uniquement sur le salarié mais incombe aux deux parties. Dans un arrêt récent, la Cour de cassation en donne une nouvelle illustration.

Heures supplémentaire : charge de la preuve

Selon le Code du travail, lorsque les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur est tenu d’établir les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés (Code du travail, art. L. 3171-2).

Par ailleurs, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. (C. trav., art. L. 3171-4).

La Cour de cassation conclut de ses dispositions qu’il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures réalisées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge, sur la base des éléments produits, forme ainsi sa conviction et évalue souverainement sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Heures supplémentaires : nouvelle illustration

Dans l’affaire soumise devant la Cour de cassation, un menuisier sollicite le paiement d’heures supplémentaires à hauteur de 4 heures par semaine travaillée. Il justifie par ailleurs sa demande en produisant un document émanant de l’entreprise daté du 29 septembre 2012 et décomposant le temps de travail de la façon suivante :

  • Du lundi au jeudi :
    • 7h – 8h : prĂ©paration, chargement et conduite,
    • 8h – 12h et 13h-17h : travail et retour
  • Le vendredi :
    • 7h – 8h : prĂ©paration, chargement et conduite,
    • 8h- 12 et 13h-16h : travail et retour.

Ce document laisse ainsi entendre une durée hebdomadaire de 44 heures au lieu des 39 heures payées au salarié.

La cour d’appel rejette la demande du salarié au motif que le salarié ne donne aucun décompte précis des sommes revendiquées, les seuls éléments communiqués par ce dernier étant de 4 heures x le nombre de semaines travaillées, sans précision sur les périodes d’absences et de congés.

La Cour de cassation rejette cet argumentaire ; elle considère en effet que le document daté du 29 septembre 2012 correspond à des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre.

La Cour de cassation ajoute par ailleurs que l’employeur ne produisait aucun élément de contrôle de la durée de travail.

Notez le

Cette décision va dans la continuité des décisions prises récemment par la Cour de cassation (voir l’article « Preuve des heures supplémentaires : dès que le salarié apporte un élément, il faut répondre ! »).

Vous trouverez tous les détails sur la rémunération des heures supplémentaires dans le Bâtiment et les majorations applicables dans notre documentation « Social Bâtiment ACTIV ».


Cour de cassation, chambre sociale, 4 octobre 2023, n° 21-24.625 (en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction)

Jennifer Laredo Costa

Responsable RH dans une entreprise du secteur du BTP