La démission peut-elle se déduire du comportement du salarié ?

La démission ne se présume pas. Elle doit procéder d’une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail. Cette volonté doit être manifestée auprès de l’employeur.

En d’autres termes, la démission doit, d’une part, être donnée librement par le salarié, en dehors de toute contrainte et de toute pression. D’autre part, elle doit être explicite, ce qui ne permet pas de la présumer.

Ainsi, jusqu’à présent, en cas d’absence injustifiée, d’abandon de poste ou de refus d’exécuter le travail, l’employeur ne pouvait pas déduire de ces comportements une volonté démissionnaire du salarié. Ainsi, quand le salarié est absent sans autorisation préalable et tarde à se justifier, ce seul retard ne pouvait pas suffire en principe à le considérer comme démissionnaire, surtout lorsque l’employeur ne pouvait ignorer qu’il était en arrêt maladie ou en accident du travail. En effet, ces attitudes et comportements ne constituent pas une volonté claire et non équivoque de démissionner. Il appartenait à l’employeur qui estimait que l’attitude du salarié emportait rupture du contrat de travail de prendre l’initiative de la rupture en procédant au licenciement disciplinaire du salarié. La faute généralement retenue était la faute grave lorsque l’employeur établissait l’existence de perturbations préjudiciables au bon fonctionnement de l’entreprise.

Cependant cette solution jurisprudentielle a été remise en cause par la loi « Marché du travail » du 21 décembre 2022 qui a instauré le principe d’une présomption de démission en cas d’abandon de poste par le salarié. Cette présomption s’applique au salarié qui a abandonné volontairement son poste.

Ainsi, la loi prévoit que « le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure à cette fin, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, est présumé démissionnaire ».

Il en résulte que deux conditions sont nécessaires pour que cette présomption soit reconnue :

  • il faut tout d’abord que l’absence ou l’abandon de poste soit volontaire : ce qui signifie que la prĂ©somption ne peut pas s’appliquer lorsque l’abandon de poste est contraint et rĂ©sulte de manquements de la part de l’employeur, mais Ă©galement quand le salariĂ© a des raisons mĂ©dicales ou qu’il exerce son droit de retrait ou son droit de grève. Ainsi, le salariĂ© qui a quittĂ© son poste pour des raisons de sĂ©curitĂ© ou de santĂ©, ou pour s’opposer Ă  une modification unilatĂ©rale de son contrat, ou parce qu’il refuse d'exĂ©cuter une instruction contraire Ă  une rĂ©glementation ne peut pas ĂŞtre prĂ©sumĂ© dĂ©missionnaire ;
  • ensuite, il faut que le salariĂ© ait Ă©tĂ© mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste par lettre recommandĂ©e ou par lettre remise en main propre contre dĂ©charge dans un dĂ©lai et qui ne peut pas ĂŞtre infĂ©rieur Ă  15 jours.

Dès lors, le salarié qui, à l’expiration du délai fixé par l’employeur de 15 jours minimum à compter de la première présentation de la mise en demeure, le décompte s’effectuant en jours calendaires, n’aura pas repris le travail ou informé l’employeur des motifs de son absence est présumé avoir démissionné et le contrat est présumé rompu à l’expiration de ce délai. La jurisprudence devra décider si le préavis de démission prévue par la convention collective est applicable à la situation et si son inexécution (probable) par le salarié ouvrira droit à l’indemnité compensatrice.

Par ailleurs, le Code du travail ne précise pas si l’employeur devra notifier ou informer par écrit le salarié de cette démission présumée (cela est toutefois souhaitable). Mais il devra nécessairement à tout le moins adresser au salarié les documents de fin de contrat obligatoires, comme dans le cas d’une démission normale (certificat de travail, attestation employeur France Travail (anciennement Pôle emploi) et reçu pour solde de tout compte). Il convient d’attendre la publication du décret fixant les modalités d’application de la rupture présumée qui détaillera les éventuelles obligations formelles de l’employeur pour la mise en œuvre du dispositif.

Le salarié pourra contester la rupture de son contrat de travail et la présomption de démission en saisissant le conseil de prud’hommes. L’affaire sera portée directement devant le bureau de jugement, qui se prononcera, au fond, sur la nature et les conséquences de la rupture dans le délai de 1 mois à compter de sa saisine. La loi de précise pas le délai dans lequel pourra être formée la requête prud’homale. Mais sur ce point on rappelle que le Code du travail pose un délai de prescription de 12 mois pour les actions portant sur la rupture du contrat.

Cette mesure devrait conduire probablement les salariés à répondre à la mise en demeure en invoquant les éventuels manquements de l’employeur. En effet, lorsque le départ du salarié pour une autre entreprise est justifié par le comportement fautif de l’employeur, les juges estiment que ce départ ne résulte pas d’une volonté libre, claire et non équivoque, mais des manquements de l’employeur, de sorte que la démission ne peut être caractérisée.

Par ailleurs, il existe d’autres comportements ou attitudes qui ne peuvent pas laisser présumer l’existence d’une démission. Ainsi, le fait pour le salarié d'avoir recherché un nouvel emploi (et de l'avoir trouvé) lors de la mise en liquidation judiciaire de la société ne démontre pas une volonté claire et non équivoque de démissionner

De même, ne manifeste pas une volonté claire et non équivoque de démissionner le salarié qui recherche un autre emploi après s’être vu notifier la suppression de son poste et une dispense d’activité.

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