Métallurgie : un délégué syndical en télétravail pendant la crise peut-il circuler librement dans l’entreprise ?

Publié le 25/06/2020 à 07:47 dans Sécurité et santé au travail métallurgie.

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Pendant la crise sanitaire, l’Etat a édicté des règles d’urgence qui ont limité le droit de se déplacer et de se réunir dans l’entreprise. Comment ces mesures s’articulent-elles lorsque les délégués syndicaux se retrouvent placés en télétravail ? Une décision du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire nous éclaire sur les réponses.

Caractère proportionné ou non des mesures de limitation d’accès au site

D’après le Code du travail, les délégués syndicaux peuvent, tant durant les heures de délégation qu'en dehors de leurs heures habituelles de travail, circuler librement dans l'entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l'accomplissement de leur mission, notamment auprès d'un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l'accomplissement du travail des salariés.

Une entreprise de construction aéronautique a fermé ses sites le 17 mars 2020 en raison de la mise en place des mesures de confinement prises pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Le 23 mars, les sites ont pu rouvrir partiellement en suivant les règles de sécurité et dans le respect des autorisations de poursuite de l’activité.

Des autorisations permanentes de déplacement ont été délivrées à certains membres du CSE et notamment à ceux appartenant à la commission sécurité. Cette autorisation permanente de déplacement n’a pas été accordée à des délégués syndicaux. Ces derniers ont saisi les tribunaux afin de pouvoir accéder aux sites de la société.

Les juges précisent dans cette décision que pour caractériser un trouble manifestement illicite, la limitation de la liberté de circulation doit s’apprécier au regard de l’ordre juridique exceptionnel qui limite de façon générale la liberté de circulation et en tenant compte du caractère proportionné ou non de la restriction de cette liberté fondamentale par rapport au but de protection sanitaire des salariés.

Réunion par téléphone : mesures proportionnées

Un délégué syndical indiquait qu’il n’avait pas pu participer à une réunion en visio car son employeur n’avait pas voulu qu’il puisse accéder au site afin d’utiliser son ordinateur. En effet, le délégué syndical n’avait pas une connexion Internet suffisante à son domicile. Cependant, le délégué syndical avait pu participer par téléphone à la réunion.

Pour les juges, cela ne viole aucune règle de droit. La mesure était proportionnée par rapport au but de protection sanitaire.

En revanche, qu’en est-il de l’impossibilité d’accéder au site pour un délégué syndical ? L’employeur pouvait-il invoquer la protection sanitaire pour refuser l’accès au site ?

Interdiction d’accès au site d’un délégué syndical : mesure jugée disproportionnée et employeur condamné dans la métallurgie

L’entreprise avait refusé de délivrer des autorisations de déplacement à des délégués syndicaux placés en télétravail en justifiant ses restrictions en raison des mesures d’urgence afin de limiter la circulation du virus.

Seuls les membres du CSE faisant partie de la commission sécurité bénéficiaient de cette autorisation.

Le refus d’accès au site du délégué syndical le privait d’entrer en communication avec les salariés et donc d’exercer son mandat.

Pour les juges, la mesure est donc disproportionnée : le délégué syndical doit bénéficier d’une autorisation d’accès au site afin notamment de pouvoir contacter les salariés.

La société a été condamnée à émettre une autorisation d’accès au site sous astreinte de 1000 euros par jour de retard.

Le délégué syndical doit quant à lui exercer son mandat en respectant strictement les mesures sanitaires prises au sein de l’entreprise et imposées à tous les salariés et selon les modalités validées par la médecine du travail afin que l’exercice du mandat soit compatible avec la sécurité sanitaire.


Tribunal judiciaire de Saint-Nazaire – ordonnance de référé du 27 avril 2020