Convention collective : la consultation des représentants du personnel s'impose-t-elle à l’employeur pour fixer les dates de congés d'un salarié ?

Publié le 23/10/2023 à 12:27 dans Conventions collectives.

Temps de lecture : 4 min

Que ce soit pendant les congés d’été ou encore en fin d’année, l’employeur peut parfois décider de fermer son entreprise pour quelques jours. Mais attention à bien consulter sa convention collective qui peut prévoir une certaine procédure.

Convention collective SYNTEC-CINOV : une salariée licenciée suite à son refus de se conformer aux dates de congés fixées par son employeur

Une salariée, qui travaillait en tant que consultante au sein d'une une entreprise de services du numérique, avait saisi les prud'hommes suite à son licenciement intervenu en mars 2016.

Elle contestait notamment le motif de celui-ci.

Dans les faits, la salariée avait été licenciée pour insubordination, car elle avait refusé de prendre les congés imposés par son employeur du 28 au 30 décembre 2015. Elle estimait que l'employeur ne pouvait pas lui imposer ces congés dès lors qu'il n'avait pas préalablement consulté les représentants du personnel sur la période de prise des congés dans l'entreprise, ainsi que le prévoyait la convention collective.

En effet, l'article 25 de la convention collective SYNTEC-CINOV, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, prévoyait :

« L'employeur peut soit procéder à la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre, soit établir les congés par roulement après consultation du comité d'entreprise (ou à défaut des délégués du personnel) sur le principe de cette alternative.
Si l'entreprise ferme pour les congés, la date de fermeture doit être portée à la connaissance du personnel au plus tard le 1er mars de chaque année. »

Convention collective SYNTEC-CINOV : l'employeur libre de fixer les dates de congés des salariés

Devant les premiers juges, la salariée, n'avait pas obtenu gain de cause. Les juges avaient estimé que la consultation des représentants du personnel imposée par l'article 25 ne concernait pas la situation individuelle des salariés.

L’affaire est arrivée devant la Cour de cassation qui s'est ralliée à l’interprétation des juges du fond.

Pour la Cour, l'article 25, alors en vigueur, n'impose à l'employeur de consulter le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel (aujourd'hui le CSE), qu'au sujet de l'alternative ouverte à l'employeur entre la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l'établissement des congés par roulement.

L'absence de consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir.

Or dans cette affaire, les juges du fond avaient relevé que l'employeur avait satisfait à son obligation de consultation de la salariée au sujet de ses dates individuelles de congés en respectant le délai de prévenance. Il était donc en droit de fixer la date des congés de l'intéressée.

Par conséquent, c'est à juste titre que, après avoir constaté que la salariée, qui avait déjà fait l'objet d'un avertissement, avait refusé de se conformer à ces directives, les juges ont pu estimer que cet acte d'insubordination constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Bon Ă  savoir

L’article 25 de la convention collective du 15 décembre 1987 mis en cause au moment des faits est remplacé par l’article 5.4 de la convention collective issue de l’avenant n° 46 du 16 juillet 2021. Sa nouvelle rédaction n’aurait pas eu les mêmes effets dans cette affaire, puisqu’il est indiqué clairement que le CSE doit être consulté en cas de fermeture de l’entreprise :

« L'employeur peut après consultation du comité social et économique (CSE) s'il existe :

  • soit procĂ©der Ă  la fermeture totale de l'entreprise ;
  • soit Ă©tablir les congĂ©s payĂ©s par roulement.

En cas de fermeture totale de l'entreprise pour congés payés sur la période du 1er mai au 31 octobre, la date de fermeture doit être portée à la connaissance des salariés au plus tard le 1er mars de chaque année.
En cas de fermeture totale de l'entreprise pour congés payés en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, la date de fermeture doit être portée à la connaissance des salariés au plus tard 2 mois avant le premier jour de fermeture de l'entreprise.
En cas de prise des congés payés par roulement, les dates individuelles des congés payés sont fixées par l'employeur après consultation des salariés et en fonction des nécessités du service. La liste de principe des tours de départ est portée à la connaissance des salariés 2 mois avant leur départ. »

Cour de cassation, chambre sociale, 27 septembre 2023, n° 21-19.483 (la convention collective SYNTEC-CINOV n'impose à l'employeur de consulter les représentants qu'au sujet de l'alternative ouverte à l'employeur entre la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l'établissement des congés par roulement. L'absence de consultation sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir)