Titre de séjour : la rupture est justifiée dès l’expiration du titre si le salarié ne justifie pas d’une demande de renouvellement

Publié le 02/01/2024 à 07:52 dans Rupture du contrat de travail BTP.

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Un salarié étranger peut, sous condition, continuer à exercer son activité professionnelle pendant trois mois à compter de l’expiration de son titre de séjour. Les juges ont récemment statué sur les règles applicables en la matière.

Titre de séjour : la nécessaire rupture du contrat d’un salarié ne disposant plus d’un titre de séjour en cours de validité

Lorsque vous embauchez un salarié étranger pour une durée qui dépasse la date de fin de validité de son titre de séjour l’autorisant à travailler, vous devez veiller à ce que celui-ci fasse les démarches administratives pour renouveler son titre. Il conviendra de demander au salarié une copie du récépissé de cette demande.

La jurisprudence estime que l’absence de renouvellement du titre constitue une cause objective qui justifie la rupture du contrat de travail du salarié étranger et vous pouvez, sans délai, entamer une procédure de licenciement. Conserver à votre service ce salarié sans titre constituerait du travail illégal et vous risqueriez d’être pénalement sanctionné.

Les démarches administratives peuvent toutefois être longues et se pose la question de la rupture dans l’attente du renouvellement. La Cour de cassation a statué sur ce point dans un récent arrêt.

Titre de séjour : un salarié qui a demandé le renouvellement dans les deux mois précédant son expiration peut continuer à travailler pendant trois mois

Dans l’arrêt rendu par la Haute juridiction, un agent de sécurité n’avait pas fait parvenir à son employeur son nouveau titre de séjour malgré la mise en demeure qui lui avait été adressée : son contrat a été rompu pour absence de titre de séjour lui permettant de travailler sur le territoire français.

Le salarié a contesté son licenciement et la cour d’appel a fait droit à sa demande : elle a estimé que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse car le salarié détenait une carte de résident qui valait autorisation de travail et que ce dernier pouvait continuer à exercer son activité pendant une durée de trois mois après l’expiration de son titre sans avoir à justifier auprès de son employeur d'une démarche réalisée pour en obtenir le renouvellement.

La Cour de cassation rappelle qu’entre la date d’expiration de la carte de résident et la décision de l’autorité administrative sur la demande de renouvellement, dans la limite de trois mois à compter de l’expiration du titre, l’étranger peut justifier de la régularité de son séjour par la présentation de la carte qui est arrivée à expiration. Cela lui permet de conserver ses droits sociaux, y compris son droit d’exercer une activité professionnelle.

Elle rappelle également que l’étranger qui séjourne déjà en France dispose d’un délai de deux mois avant l’expiration de sa carte de séjour pour présenter sa demande de renouvellement.

Elle en déduit que la combinaison de ces deux règles, issues du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, implique qu’un étranger doit, pour pouvoir bénéficier du délai de trois mois pendant lequel il peut continuer à exercer son activité professionnelle, solliciter le renouvellement de son titre dans les deux mois précédent l’expiration de sa carte de séjour. A ce titre, le raisonnement de la cour d’appel était erroné car elle avait déduit que ce délai de deux mois ne s’appliquait pas à la situation en cause.

Si le salarié ne justifie pas des démarches entamées en vue du renouvellement de son titre dans ce délai de deux mois précédant l’expiration de son titre, la rupture du contrat dès l’expiration du titre de séjour peut donc être justifiée. A contrario, lorsque cette démarche a été réalisée dans le délai légal, le travailleur étranger pourra continuer à travailler durant trois mois.


Cour de cassation, chambre sociale, 29 novembre 2023, n° 22-10.004 (un étranger, titulaire d'une carte de résident, doit, pour bénéficier du délai de trois mois lui permettant, après expiration de son titre, de conserver son droit d'exercer une activité professionnelle, en solliciter le renouvellement dans les deux mois précédant cette expiration)

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Camille Kriegel

Juriste droit social en cabinet d'expertise comptable

Master 2 Droit social interne, européen et international - Université de Strasbourg