Préavis de licenciement : bien lire sa convention collective pour déterminer la durée applicable au salarié !

Publié le 24/07/2023 à 09:33 dans Conventions collectives.

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Lorsqu’un salarié a été licencié pour faute grave, et qu’après avoir contesté son licenciement, les juges écartent la faute grave, il bénéficie notamment d'une indemnité de préavis. Mais comment la calculer lorsque la convention collective prévoit plusieurs durées de préavis selon la catégorie professionnelle et l’ancienneté ?

Conventions collectives : un salarié licencié à tort pour faute grave obtient une indemnité compensatrice de préavis

Un salarié avait été embauché comme directeur de magasin, statut cadre, au sein d'une chaîne de supermarchés en décembre 2015. Après avoir été mis à pied à titre conservatoire, le salarié avait été licencié pour faute grave en juillet 2016.

Le salarié avait saisi les prud'hommes pour contester son licenciement.

Devant les premiers juges, il avait eu gain de cause : les juges avaient écarté la faute grave, et son licenciement avait été requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse. Conséquence : le salarié avait obtenu des sommes au titre de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis.

Notez le

En cas de rupture du contrat à l'initiative de l’employeur, le salarié en CDI bénéficie d’une indemnité de licenciement et du droit à exécuter un préavis (ou d’une indemnité compensatrice). Toutefois, lorsque le motif du licenciement est la faute grave ou lourde, le salarié ne bénéficie d'aucune de ces indemnités.

Mais dans cette affaire, bien qu'ayant obtenu satisfaction sur le principe, le salarié s'était pourvu en cassation. Il n'était en effet pas d'accord avec le montant qui lui avait été octroyé au titre de l'indemnité compensatrice de préavis. En se penchant sur la convention collective, les premiers juges avaient estimé que ce montant devait être limité à un mois de salaire, alors que de son côté le salarié estimait qu'il devait bénéficier de 3 mois de salaire.

Conventions collectives : le salarié cadre bénéficie de la durée de préavis applicable à sa catégorie professionnelle

La Cour de cassation s'est donc penchée sur l'ensemble des textes conventionnels applicables (convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire).

La Cour commence par rappeler un principe de base : une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

Puis la Haute juridiction reprend les termes de deux séries d'articles de la convention collective dans leur rédaction en vigueur au moment des faits :

  • tout d'abord les articles 3.12.1 et 3.12.2 : dans le cas de rupture de contrat de travail à durée indéterminée, la durée du préavis, réciproque, sauf cas de faute grave ou de force majeure, est fixée pour chaque catégorie professionnelle dans les annexes (...).
    Toutefois, en cas de licenciement pour un motif autre qu'une faute grave ou lourde, la durée minimale du préavis dû par l'employeur est fixée comme suit, conformément à la législation en vigueur :
    Lorsque le salarié a plus de 1 mois de présence continue et moins de 2 ans d'ancienneté ininterrompue dans l'entreprise : 1 mois de délai-congé.
    Lorsque le salarié compte 2 ans d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur : 2 mois de délai-congé.
  • puis l'article 7.1 de l'annexe III relative aux cadres de la convention collective : la durée du préavis est fixée à 3 mois, sauf en cas de faute grave.

Pour la Cour de cassation, la cause est entendue : la durée de préavis applicable aux cadres est de 3 mois, sauf en cas de faute grave.

Or la Cour relève que, pour fixer le montant de l'indemnité compensatrice de préavis due par l'employeur au salarié, les premiers juges avaient retenu que, tenant son ancienneté de 7 mois au jour du licenciement, le salarié ne pouvait prétendre qu'à une indemnité compensatrice de préavis représentant un mois de salaire.

A tort pour la Cour de cassation, puisque c'est l'annexe relative aux cadres fixant la durée du préavis à 3 mois qui trouve à s'appliquer dans cette affaire. Celle-ci devra donc être rejugée.

Bon à savoir

Les articles de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire en cause dans cette affaire ont été complètement réécrit depuis les faits :

  • par avenant n° 70 du 15 janvier 2019 pour le titre III de la convention. Ainsi l’article 3.9 dans sa nouvelle rédaction renvoie directement aux annexes catégorielles pour connaitre les durées de préavis ;
  • par avenant n° 74 du 13 mars 2019 pour l’annexe III relative aux cadres. Le nouvel article 5 de cette annexe maintient la durée du préavis à 3 mois pour les cadres (sauf en cas de faute grave ou lourde).

Cour de cassation, chambre sociale, 21 juin 2023, n° 22-12.844 (une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte)