Conventions collectives : le salarié qui estime être victime d'une inégalité de traitement doit présenter aux juges des éléments convaincants !

Publié le 12/06/2023 à 08:38 dans Conventions collectives.

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Le principe d'égalité de traitement impose à l’employeur d’assurer une même rémunération à ses salariés dès lors qu’ils sont placés dans une situation identique. Mais en pratique, l'application de ce principe peut s'avérer délicate, notamment lorsque des accords collectifs viennent remettre certaines situations établies en cause. C'est alors au salarié qui considère subir une inégalité de traitement d'apporter des éléments suffisamment probants...

Conventions collectives : une perte de salaire pour des salariés promus avant l'entrée en vigueur d'un protocole d'accord ?

Une salariée, d'abord embauchée par une caisse primaire d'assurance maladie, avait, à la suite de l'obtention du diplôme correspondant, été recrutée en 1991 par une URSSAF en qualité d'agent de contrôle. Par la suite, elle avait occupé cet emploi au sein d'une autre URSSAF avant d'être licenciée en 2016.

Elle avait alors saisi la juridiction prud'homale, estimant avoir été victime, au cours de sa carrière, d'une inégalité de traitement.

Le cœur du litige concernait l'article 32 de la convention collective du personnel des organismes de Sécurité sociale qui, à compter d'un protocole d'accord en date du 14 mai 1992, avait redistribué les cartes concernant les échelons attribués après la réussite à l'examen sanctionnant la fin d'études de la formation des cadres. En application de ce protocole d'accord, ces échelons devaient désormais être conservés par le salarié lors de sa promotion aux fonctions d'inspecteur du recouvrement.

Or, la salariée faisait valoir que le bénéfice de ces mêmes échelons lui avait été supprimé lors de sa promotion en 1991. Pour la salariée, la suppression de ces échelons s'était traduite par une perte de salaire pour les salariés promus avant l'entrée en vigueur du protocole d'accord, dont n'avaient pas eu à souffrir les salariés promus après cette date qui avaient, quant à eux, bénéficié du maintien de ces échelons.

La salariée ne s'arrêtait pas là, puisqu'elle produisait également une décision de justice de décembre 2014 concernant une de ses collègues qui s'était trouvée dans une situation similaire et avait, quelques années plus tôt, saisi les juges sur ce thème. Cette collègue avait alors obtenu un rappel de salaire conséquent à ce titre.

Mais les premiers juges n'avaient pas donné gain de cause à la salariée. Ils avaient estimé que les éléments qu'elle produisait ne permettaient pas d'établir que, du fait de la suppression des échelons de l'article 32, elle avait eu une rémunération moins élevée que les inspecteurs du recouvrement auxquels elle se comparaît.

Conventions collectives : au salarié de démontrer l'inégalité de traitement introduite par le protocole d'accord

Saisie à son tour, la Cour de cassation s'aligne sur la décision des premiers juges.

La Cour commence par rappeler que le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés engagés ou promus postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide. La condition étant qu'ils ne bénéficient, à aucun moment, d'une classification ou d'une rémunération plus élevée que celle des salariés engagés ou promus antérieurement à l'entrée en vigueur du nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire.

Or, la Cour souligne que les juges du fond avaient constaté que les éléments produits par la salariée concernant certains de ses collègues ne permettaient ni d'établir que ces salariés se trouvaient dans une situation identique ou similaire, faute d'informations suffisamment précises, ni qu'ils avaient bénéficié d'une rémunération plus élevée ou d'un déroulement de carrière plus favorable.

D'autre part, les éléments contenus dans la décision de justice de décembre 2014 ne permettaient pas non plus de vérifier concrètement l'existence d'une situation identique ou similaire à celle de la salariée.

En d'autres termes, la salariée n'avait pas fourni d'éléments suffisamment probants, ce qui n'avait pas permis aux juges de caractériser une inégalité de rémunération.


Cour de cassation, chambre sociale, 24 mai 2023, n° 21-17.027 (en cas d’inégalité de traitement, le salarié doit fournir les éléments prouvant que d’autres salariés placés dans une situation identique à la sienne ont bénéficié d'une rémunération plus élevée ou d'un déroulement de carrière plus favorable)